Objet : observations relatives au projet de classification V2021
Madame le Dr Joëlle DUBOIS,
Chef du service Classifications, information médicale et modèles de financement. ATIH,
13, rue Moreau 75012 Paris
Madame et chère collègue,
Le CNP de MPR, la SOFMER et le SYFMER saluent la volonté d’aboutir à une classification médico-économique transparente, équitable et plus efficiente pour les activités de SSR.
Il prend acte des travaux en vue d’une classification à visée tarifaire par cas traité applicable à l’ensemble des unités de SSR. Nos organisations se félicitent que la réadaptation, une des activités fondamentales des SSR, intervienne dès le second niveau de l’algorithme dans l’objectif de décrire des groupes nosologiques de réadaptation. Dans cette perspective de description d’activités plus homogènes, mieux adaptées à un financement par cas traité, elles se réjouissent des travaux visant à améliorer la capacité descriptive du CSARR.
Néanmoins, la lecture des documents relatifs au projet de classification 2021 présents sur la plateforme de l’ATIH appelle quelques remarques relatives à l’évolution de la classification. Le CNP, la SOFMER et le SYFMER prennent acte de la définition des nouveaux groupes de réadaptation non sans certaines inquiétudes.
1. La séquence nous paraît plus pertinente que le séjour complet pour décrire des activités dont la consommation de ressources est cliniquement et économiquement homogène 1,2. Le séjour SSR ne peut constituer un objet de coût pertinent du fait :
– de la variabilité des finalités principales de prises en charge au cours d’un séjour dans une même unité SSR. C’est la conséquence de l’indistinction historique des missions des SSR entre soins curatifs prolongés, de soins de réadaptation ou de soins avec hébergement de transition. Des séjours présentant les mêmes caractéristiques PMSI peuvent dès lors relever d’une ou de plusieurs finalités successives.
– de l’impact variable de l’organisation de l’amont et de l’aval sur les durées de séjour. La séquence permet de distinguer des programmes de soins similaires et de complexité variable contribuant à la description de la gradation des activités. Les séquences de réadaptation doivent être décrites en groupes de réadaptation fondés sur le potentiel de réadaptation, qui détermine les programmes de soins et les ressources engagées.
2. Le CNP, la SOFMER et le SYFMER s’interrogent sur les capacités du CSARR à capter des procédures cliniquement homogènes de réadaptation, à identifier des séquences de réadaptation pertinentes et a fortiori des séjours de réadaptation homogènes. Le CSARR est aujourd’hui l’un des seuls moyens d’identifier les programmes de soins à forte densité de rééducation-réadaptation (RR) et les structures de réadaptation intensive et complexe, de recours ou de référence qui les mettent en oeuvre. Toutefois le périmètre du CSARR défini sur le document de présentation des GME 2021 est beaucoup trop étendu par rapport aux définitions internationales de l’OMS et de l’ICHA. La réadaptation, ensemble d’interventions et fonction fondamentale des structures de réadaptation vise l’optimisation des capacités fonctionnelles. Elle n’inclut ni la prévention, ni l’éducation thérapeutique qui est non spécifique, ni les soins de confort et de bien-être.
Nos organisations approuvent les efforts de recentrage du CSARR par l’adaptation des pondérations mais restent prudentes sur l’identification d’actes marqueurs qui ne présentent pas les qualités de descripteurs de coûts utilisées en court séjour. Les pratiques d’optimisation du codage au cours du séjour risquent de limiter la qualité de la mesure.
Le CSARR apparaît davantage comme descripteur des ressources d’une structure qu’un marqueur de programmes de soins cliniquement homogènes et pertinents. Les pondérations favorisent la rémunération de la diversité des métiers présents plus que l’intensité réelle des soins. Celle-ci est mieux appréciée par les temps de réadaptation utilisés comme unité d’oeuvre dans l’échelle nationale des coûts (ENC).
3. Des simulations et un temps d’ajustement selon leurs résultats sont indispensables. Afin d’obtenir une meilleure vue d’ensemble des impacts du projet de classification le CNP de MPR, la SOFMER et le SYFMER souhaitent avoir connaissance du case-mix des établissements sur les années 2018 et/ou 2019 sous cette nouvelle classification. En effet, il nous parait essentiel pour l’ensemble des structures de MPR que nous représentons de s’assurer par ces simulations que cette nouvelle classification en GME reflète correctement nos activités spécialisées.
4. Nous invitons l’ATIH à poursuivre ses travaux en concertation avec les parties prenantes, dont les CNP, dans la perspective de la description d’activités plus homogènes sous le double aspect clinique et économique. Nous proposons pour cela d’intégrer aux outils descriptifs des caractéristiques du patient un indice de sévérité des pathologies, un outil de mesure du statut fonctionnel beaucoup plus performant que l’actuel score de dépendance, une évaluation de la complexité des besoins de réadaptation, enfin une évaluation des facteurs psycho-socio-environnementaux très hétérogènes selon les territoires et aujourd’hui non captés par le modèle. La poursuite des efforts de simplification du codage, notamment de sa périodicité, est attendue.
Sans définition des moyens nécessaires pour des programmes de soins pertinents, le couple ENC / classification à visée tarifaire risque de lisser toujours vers le bas les prises en charges à fortes densités de Rééducation-Réadaptation.
Nous l’invitons aussi à faire évoluer la classification de telle sorte qu’elle puisse ajuster les financements dans la perspective d’une gradation territoriale des activités de SSR en fonction de la prévalence des situations cliniques, de la technicité et des coûts des programmes mis en oeuvre.
Nous vous prions d’agréer, chère collègue, l’expression de nos respectueuses salutations.
Brigitte Barrois
Présidente du CNP de MPR
Isabelle Laffont
Présidente de la SOFMER
Jean-Pascal Devailly
Président du SYFMER
1 Rode G, Barrois B, Le Moine F, de Korvin G, Yelnik A, Joseph PA. Financement SSR Pour un modèle reposant sur la Classification internationale du fonctionnement. Revue Hospitalière de France. Décembre 2013.
2 Devailly JP. SSR : quels outils de description fine pour porter le financement de demain ? Revue Hospitalière de France n° 590, septembre-octobre 2